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#44

Émilie Brout & Maxime Marion

QUICKENING

Exposition personnelle

Texte de Sarah Ihler-Meyer

13/04/2017 - 27/05/2017

Post-internet, post-photographie, post-humain,… Émilie Brout & Maxime Marion semblent métaboliser tous les « post ». Faisant voler en éclats les dualismes classiques opposant l’organique et le technologique, le réel et le virtuel, l’humain et l’animal, le sauvage et le domestique ou encore l’original et la copie, le duo prend acte d’une réalité cyborg, hybride de nature et de culture toujours déjà advenue mais qui ne cesse d’accroître ses potentialités avec l’essor des technosciences.

 
« Quickening » met ainsi en œuvre plusieurs zones d’indistinction entre des pôles a priori antinomiques. Tout d’abord entre corps et machines, notamment avec Denim, une série de jeans scellés sous plastique, tels des spécimens d’une archéologie du futur, portant les empreintes de téléphones portables, comme si ces derniers ne faisaient plus qu’un avec leurs possesseurs, devenus prothèses ou réalité augmentée de leurs propres corps.

Cette indifférenciation entre organique et artificialité se retrouve avec Oasis Max Life, une sculpture constituée d’écrans tactiles enfoncés dans une brique de mousse florale et affichant des GIFs animés de plantes vertes récupérés sur Internet. Soit une sorte de plante cyborg où la nature, aussi sauvage soit-elle, n’est plus qu’un code numérique à usage domestique.

Ce mouvement de bascule se retrouve avec Chien-loup, à savoir plusieurs vestes de camouflage cousues entre elles de manière à recomposer un motif d’arbre infini sur fond orange fluo, couleur invisible face aux gibiers. Une haute technologie textile permet ici aux prédateurs-chasseurs de se fondre dans la forêt et d’adopter le principe de camouflage de leurs proies, le devenir-virtuel de la nature se confondant ainsi pour les êtres humains avec un étrange devenir-animal.

Un autre type de brouillage des frontières est à l’œuvre avec les ♥ Paintings : quatre téléphones portables accrochés au mur comme le seraient de petits tableaux affichent ici des photos puisées sur différents comptes Instagram suivis par les artistes, en partie recouvertes et reproduites à l’identique par de la peinture à l’huile. Une manière pour le duo de reconduire ces images pittoresques à leur possible inconscient, à savoir un ensemble de représentations issues de l’histoire de l’art, en particulier du Romantisme allemand, ayant construit et informé notre regard sur le paysage. Ici, à l’image du cyborg, plus d’oppositions entre nature et culture, original et copie, tout étant d’ores et déjà hybridations et réplications sans origine, modèle ni essence.

C’est un même type d’indifférenciation qui semble valoir avec Clé USB reçue par erreur contenant l’œuvre La Liberté en écorchée – version longue d’ORLAN et saisie dans la glace par Laurent Pernot via www.matchart.net. En effet, comme son titre l’indique, réalisée à partir d’une clé USB d’ORLAN, artiste cyborg s’il en est, reçue par erreur par le duo et saisie à leur demande dans une fausse glace par l’artiste Laurent Pernot, cette pièce à plusieurs mains met à mal les notions d’auteur, d’original et de copie, de vrai et de faux. 
 

Avec Lightning Ride, ce sont cette fois-ci les pôles du technologique, de l’organique et du mysticisme qui se télescopent avec l’électricité pour point de jonction. Il s’agit là d’une vidéo réalisée à partir d’extraits de « Taser Certifications », une sorte de cérémonie autorisant aux Etats-Unis l’usage de Tasers à condition de se faire soi-même taser. Passées au filtre « peinture à l’huile » sur Photoshop, ralenties et accompagnées d’une inquiétante bande-son, les images qui se succèdent donnent à voir des corps et des visages dont les positions et déformations évoquent aussi bien une douleur qu’une extase christiques. Tout se passe ici comme si la fée électricité, symbole de la rationalisation du monde, relançait de manière paradoxale une aspiration à la transcendance, les antipodes se rejoignant et disparaissant au profit d’une nouvelle carte des possibles.

DOSSIER DE PRESSE

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